A la rencontre de Zayneb et de sa fille Hajar

Seconde génération, immigrée, femme, musulmane (1990)

Le phénomène de l’immigration ayant été analysé à différents niveaux, il paraît important à cette époque de l’année, de s’attacher à la problématique de la jeune immigrée de la seconde génération.

Il est vrai que la femme immigrée vit difficilement son insertion dans la société d’accueil. Sans vouloir minimiser nullement ces difficultés, il semblait important d’aborder la vie de la jeune immigrée d’origine musulmane.

La jeune musulmane immigrée de la seconde génération est celle qui entre tous, paye le plus grand tribu à l’immigration. Vivant dans un milieu familial où les traditions sont souvent restées figées, ainsi que dans une société d’accueil où les valeurs culturelles sont fondamentalement différentes, il lui faut souvent faire la part des choses.

Au moment d’aborder son adolescence, et donc d’affirmer sa personnalité, elle se trouve devant un dilemme : comment vivre, quoi choisir, quelle est la meilleure culture, quels sont les meilleurs comportements ? Cette difficulté débute souvent avec la première relation affective, et lui semble insurmontable.

 Faut-il en parler à la maison ? ma mère me comprendra-t-elle ?
 Il ne faut pas que l’on me voit accompagnée !
 Il ne faut pas que quelqu’un le dise à ma famille etc..

Ces quelques questions qui paraissent anodines dans la culture du pays d’accueil, sont essentielles dans la culture d’origine.
A ces comportements, des réponses sont toute prêtes dans certaines familles : mariage forcé !
Retour au pays d’origine, arrêt de la fréquentation scolaire.
Ces réponses sont loin des droits à la liberté pour lesquels ont combattu les mouvements féministes et féminins.

N’oublions pas que la virginité a encore toute sa place dans l’immigration de culture musulmane (virginité au sens unique, jamais il ne sera demandé à un homme s’il est vierge, alors que la religion le demande pour l’homme et pour la femme).
A cette problématique, certaines ont trouvé des solutions techniques telle que la suture d’hymen, technique de plus en plus sollicitée par de jeunes musulmanes.
Mais comment assumer ce mensonge sur lequel sera construite toute une vie ? Comment baser une vie de couple sur une virginité retrouvée ? Et si un jour quelqu’un de "bien" intentionné en parlait.

La jeune immigrée musulmane, restera-telle toujours cette mineure à perpétuité, qui ne peut en aucun cas poser un acte responsable ?

Et si la jeune musulmane se prenait à aimer un non musulman ? Très souvent, elle se voit contrainte à quitter le domicile paternel, soit sur pression du milieu familial, soit par crainte des réactions de ce milieu, ceci les oblige à couper toutes relations avec leur milieu d’origine.
Ce qui amène certaines plus tard à devoir faire face à un gouffre de solitude affective et relationnelle (très souvent elles se coupent totalement de leur milieu d’origine).

Ceci ne sont que deux exemples de ce que peuvent vivre les jeunes immigrées de la seconde génération, il est certain que beaucoup d’entre elles échappent ou tentent d’échapper tant à la pression familiale qu’à celle de la société d’accueil, et qu’elles trouvent un juste milieu qui devient pour elles une ligne de conduite.

Pour d’autres, cette vie biculturelle entraîne de lourdes conséquences : de suicide, drogue, prostitution.
De plus en plus des structures, des groupes de jeunes femmes immigrées ou de jeunes filles se mettent en place et essaient de mettre ensemble leur vécu et leur expérience pour trouver des solutions à leurs problèmes.
Comme tous les mouvements féminins, il est évident que les jeunes immigrées commencent à s’organiser et à se battre en vue d’obtenir un statut qui correspond plus à leurs aspirations.

Naïma AKHAMLICH
Assistante sociale au
Planning des Marolles